Les clefs
J’ai pris la clef des champs et volé en chemin
Les arbres fredonnaient leur chanson du matin
Des elfes encerclaient un grand feu de brindilles
Une arche de feux -follets luisait dans la charmille
J’ai pris la clef de sol et j’ai donné le la
Un papillon du jour vint voltiger par là
Effleurant de son aile le bout de ma feuille blanche
Il mimait en silence la ronde de mes cadences
Une nuit sur le chemin où un tyran tirait
Des coups de feu en l’air ou sur terre ricochaient
Juchée sur les remparts j’ai fait rendre les clefs
Aux justes de la ville épris de liberté
J’entrai dans un palais aux colonnes dorées
J’ôtai la clef de voute et le mur s’écroula
Dans la salle sans toit où se perdaient mes pas
J’ humai dans l’air léger la fleur d’oranger
J’ai pris la clef des songes et déchiré la nuit
Combien de signes insignes il y avait dans mon lit
Des rêves s’entrechoquaient une chimère ou un roi
Dans un désert lunaire Pierrot venait à moi
Je pris la clef des Cieux et la porte du Saint-Père
J’entrai au Paradis sans effort, sans barrière,
Je vis un coffre -fort, scellant les destinées,
Las!- comment déchiffrer le livre des Mystères ?
Je pris une clef d’or au trousseau du portier
Dans un jardin secret je cueillis une pomme
Près d’une fontaine scellée il y avait un homme
Il croque désormais tout ce poème à clef !
Barbara Bordes
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