Bonjour
PRÉFACE
À l’époque de mon adolescence j’avais un petit carnet où je notais les aphorismes, les proverbes et les sentences qui me frappaient au cours de mes lectures. Un jour j’en ai trouvé une qui m’a accroché par sa formulation et par le sujet qu’elle abordait. Elle était anonyme. Elle semblait avoir été placée là dans un coin de page pour remplir un blanc. Elle disait sur deux lignes : « L’amitié, les hommes avec les hommes la vivent, les femmes avec les femmes la miment, les femmes avec les hommes la risquent, les hommes avec les femmes l’inventent. »
J’ai perdu mon carnet et j’ai oublié pratiquement tout son contenu. Mais je n’ai jamais oublié cette sentence qui m’a souvent servi de repère dans la réflexion que j’ai menée ma vie durant.
Elle m’a aidé à mon adolescence à saisir ce qu’il en était de l’amitié et concevoir la différence qu’il y avait entre les copains et les amis bien moins nombreux.
J’ai vérifié sa pertinence lorsque je me suis mis à réfléchir au mécanisme de l’amour et de la relation des sexes. Les femmes sont naturellement attractives et veillent heureusement à entretenir cette attractivité qui est au principe de leur désir. Et comme les hommes sont mus par leur désir d’une femme, elles courent donc le risque de se voir devenir l’objet du désir de celui avec lequel elles veulent entretenir une amitié. Quant aux hommes, ils doivent, quitte à inventer, trouver toutes sortes de moyens pour maîtriser leur désir d’objet.
Reste le mystère de l’amitié mimée par les femmes entre elles. J’ai dû convenir que la formulation était, là aussi, on ne peut mieux choisie. Parce que la relation d’une femme à toute autre femme se dessine sur fond de la relation toujours complexe de cette femme à sa mère. Mon expérience m’a néanmoins permis de repérer des exceptions et de voir des femmes entretenir une authentique amitié entre elles.
Cela peut se vérifier dans la correspondance entretenue finement par Maud et Sarah, sinon Sarah et Maud, qui n’ont probablement jamais su ou eu conscience que leur entreprise était une parfaite illustration de l’exception dont j’ai fait état.
Ça semble léger, anodin, ne toucher à rien mais ça fait réfléchir bien au delà des sujets abordés.
Aldo Naouri
Il faut imaginer Sisyphe heureux :
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